REISO – Revue d’information sociale

Pratiques d’accompagnement favorisant l’employabilité de jeunes vulnérables

 

«Thérapiser» l’employabilité des jeunes

L’accompagnement à l’insertion de jeunes vulnérables comporte de plus en plus de modes d’agir dont la visée peut être qualifiée de thérapeutique. Point de situation, défis et réflexions sur cette évolution.

Par Antoine Sansonnens, assistant docteur, Département de travail social, politiques sociales et développement global, Université de Fribourg.

 

Extraits :

Face à la réalité de jeunes en difficulté d’insertion socioprofessionnelle, de nombreux dispositifs destinés à faciliter la transition vers l’emploi, souvent complexe, voient le jour. Leur émergence date plus particulièrement du début des années 90 avec la montée du chômage en Suisse.

Au cœur de ces programmes figurent diverses mesures ciblées d’accompagnement. Selon le profil des jeunes suivi·e·s et leurs besoins, les soutiens proposés peuvent porter sur le domaine scolaire, professionnel, social ou encore personnel.

 

Connaissance de soi et acceptation de ses limites

La large mobilisation des pratiques du « soi » par les intervenant·e·s démontre comment le « travail sur soi », ce mode de gouvernement des personnes par elles-mêmes forme une composante saillante de l’intervention au service de l’employabilité des jeunes. Concernant les aspirations professionnelles de ce public qui peine à s’insérer en emploi et cumule les échecs, les intervenant·e·s évoquent un travail de deuil à mener. En effet, avant même d’envisager de tels objectifs, il s’agit prioritairement d’amener ces personnes à travailler sur leurs capacités, leurs limites ou encore leurs fragilités psychiques.

À l’instar de ce que recouvrent les pratiques du « soi », ce type de travail mené avec les jeunes va ainsi dans le sens d’une « thérapisation » des démarches des professionnel·le·s du secteur de l’employabilité. Avec cette tendance, l’attention portée sur l’intériorité et la psyché des jeunes s’avère grandissante. L’investissement de « l’intime » pour atténuer leurs souffrances et les faire cheminer ne semble donc plus uniquement du ressort des seul·e·s technicien·ne·s du « gouvernement de l’âme ».

 

Des vœux de rapprochement du secteur psychiatrique

Cette thérapisation s’observe également à un niveau structurel, par une collaboration entre le secteur de l’employabilité et celui du soin psychiatrique. Concrètement, ce rapprochement se donne à voir avec la mise en place de transferts facilités de jeunes vers des lieux de soins ou par l’aménagement de soutiens psychologiques proposés à l’extérieur du dispositif d’employabilité, sans pour autant stopper le programme d’insertion. Dans cette perspective, on note l’apparition de démarches innovantes portant sur la mise en place de psychothérapies de groupe au sein même de dispositifs d’employabilité destinés à ce public.

 

 

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