Interview de la directrice de l’École supérieure sociale intercantonale de Lausanne
« Le projet de filière en animation communautaire n’est pas qu’un projet d’école, mais un projet de société, pour enrichir le travail social de demain »
L’École supérieure sociale intercantonale de Lausanne a publié, à la fin de 2022, un nouveau concept andragogique et développé une filière en animation communautaire.
Interview de sa directrice, Ariane de Rham.
Extraits :
Vous êtes arrivée à la tête de l’École supérieure sociale intercantonale de Lausanne (ESSIL) en janvier 2022 et avez remodelé l’entier de son concept andragogique. Quelle vision y avez-vous imprimée ?
Ce travail s’est inscrit sur le nouveau plan d’étude cadre, défini par la Confédération et Savoir Social en 2021. Nous avons reformulé l’approche historique de l’école, à savoir former des éducateurs et éducatrices à la personnalité affirmée sur le terrain. Cela se décline en trois axes : la sphère cognitive intègre les savoirs sociaux que doivent maîtriser les travailleurs et travailleuses sociales ; la sphère pratique touche notamment ce qui est en lien avec les réflexions éthiques, soit la réflexion sur son « agir » ; finalement se trouve la sphère relationnelle et sociale, qui vient questionner la personnalité, le savoir-être, la conscience de soi. Ces trois dimensions sont intégrées dans chacun des modules de formation tout au long du cursus, ce qui est une pédagogie propre à l’ESSIL.
Vous avez également mis sur pied une filière d’animation communautaire et proposez désormais une formation en école supérieure en la matière. Quels constats ont conduit à ce développement ?
Avec cette offre de formation, nous répondons avant tout à une demande des institutions, notamment celles du champ des EMS et du handicap mental. Ces entreprises engagent de nombreux collaborateurs et collaboratrices non qualifiées en animation, et ont besoin que ce personnel accède à une formation.
Comment vous positionnez-vous face aux Hautes écoles, qui forment également des travailleurs et travailleuses sociales, et qui, jusqu’à récemment, étaient les seules à former des futur·e·s professionnel·le·s de l’animation socioculturelle ?
Nous offrons une voie de formation aux personnes qui n’ont pas accès aux Hautes écoles, qui sont déjà en poste, comme assistant·e socio-éducatif·ve ou sans formation. En fin de compte, c’est la qualité et la diversité des professionnel·le·s qui se retrouvent sur le terrain qui importe : en la matière, je ne doute pas que la cohabitation entre personnel ES et HES y sera très bonne et complémentaire. Les personnes formées en école supérieure disposent d’une expérience de terrain qui confère une confiance en soi dès les premières années de travail. Celles issues des HES disposent d’un bagage théorique plus important.
Quel regard portez-vous sur l’évolution du travail social ?
Le monde politique exige de plus en plus de normes, d’audit, d’exigences, dont certaines posent des barrières administratives au développement d’actions innovantes. D’autre part, après une longue période de soutien individuel, le temps revient aux démarches collectives, à l’intégration citoyenne, face à une solitude de plus en plus répandue. Le projet de filière en animation communautaire n’est ainsi pas qu’un projet d’école, mais un projet de société, pour enrichir le travail social de demain.