Une nouvelle édition élargie, actualisée et complétée
Avenir Social vient de publier la Une troisième édition, actualisée et complétée, de la « Chronologie des transformations dans l’aide sociale en Suisse ». Trois questions à son autrice Véréna Keller, professeure HES honoraire de la HETSL.
« L’accent est volontiers mis sur la charité privée »
Véréna Keller, vous signez une nouvelle version de « L’aide sociale en Suisse 2000-2022 ; Chronologie des transformations ». De manière générale, quels constats émettez-vous sur ces deux décennies ?
Extraits :
Véréna Keller : Les choses changent beaucoup et rapidement ! Jusqu’au tournant du siècle, l’aide sociale en Suisse se transforme peu à peu en un droit à une vie digne pour toutes et tous. Ensuite, le vent tourne. La logique de l’« État social actif » contribue à focaliser le débat public sur les « abus ». La droite politique attaque l’aide sociale voire la protection sociale dans son ensemble. Nouveau changement avec la pandémie de Covid-19. Elle favorise une prise de conscience des lacunes de la protection sociale, en particulier le non-recours aux prestations. Les longues files pour recevoir un colis alimentaire choquent en Suisse et à l’étranger et poussent plusieurs cantons et villes à créer des dispositifs de minimum vital pour des groupes précédemment exclus de la protection sociale : les personnes sans droit de séjour (les sans-papiers) et celles soumises à des conditions de travail précaires. Cependant, l’accent est volontiers mis sur la charité privée en tant qu’aide humanitaire à la survie plutôt que sur le développement de droits à la protection pour toutes et tous.
« La réglementation est souvent interprétée de manière restrictive, sans tenir compte de la situation individuelle alors que la loi le prévoit, comme si le but premier était d’éviter toute critique. »
Aujourd’hui, des responsables s’inquiètent de la baisse constante du nombre de personnes qui recourent à l’aide sociale, ce qui tend à indiquer qu’elle ne protège plus les populations aux ressources insuffisantes. Cette inquiétude n’a pourtant pas encore abouti à de décisions favorisant l’accès au droit à l’aide sociale, telles que des prestations plus élevées, la simplification de la démarche et la levée des contraintes.